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In Clips, Ryan Doubiago, S80, Sacha Barbin, Volvo
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La musique de M83 a toujours été une sorte de bande originale pour longs travellings à la surface d’univers sur lesquels on pourrait translater sans fin. Des nappes de textures synthétiques qu’on pourrait traverser comme on pénètre des bancs de brume, projecteurs antibrouillard rasant le sol au plus près pour révéler le relief, condensation dégoulinant des rétroviseurs. Il n’est pas étonnant que le cinéma pose régulièrement ses images sur ces longues plages de son, et c’est à chaque fois un plaisir à part entière, presque déconnecté du récit lui-même (pourtant bon, lui aussi), de contempler Ton Cruise surfant dans sa aéronef libellule au-dessus d’une planète Terre en ruine dans Oblivion, de Joseph Kosinsky, au son de l’original soundtrack composé par M83.

Mais les mouvements les plus simples sont encore les meilleurs. Et dans le tout nouveau clip du groupe, intitulé My tears are becoming a sea, il suffit d’une bonne vieille Volvo pour que la magie opère. Une aimable berline du début des années 2000, pour un titre lui aussi dans la force de l’âge, puisqu’on le trouvait sur cet album au titre bien trouvé, Hurry up, we’re dreaming. Sinuant dans le trafic urbain pour amener une mère imminente à temps pour qu’elle mette au monde l’enfant qu’elle porte, façon The Child d’Alex Gopher, la classique suédoise est, une fois de plus dans l’histoire des images en mouvement, un refuge familial, un abri contre les dangers du monde, une couveuse dans laquelle les prémices de la vie peuvent trouver les toutes premières conditions de leur protection. Une bagnole familiale, sur une musique familière, le tout dans une ambiance pourtant, pour le moins, étrange.

On ne va pas trop spoiler, mais parfois, même la conception particulièrement sécurisée d’une Volvo ne suffit pas. Mais qu’à cela ne tienne. Il n’y a pas que les lois de la physique dans la vie. Du moins, depuis l’origine, dans les clips de M83, d’autres forces peuvent intervenir, pour que l’inéluctable ne soit jamais tout à fait certain.

La très belle réalisation est signée par le duo Sacha Barbin et Ryan Doubiago, deux réalisateurs dont le travail vaut la peine d’être suivi. Ici, on appréciera particulièrement que le surnaturel soit traité de façon extrêmement simple, presque naïve et enfantine – et on comprendra pourquoi – et que le soin esthétique soit posé, au contraire, sur ce qui pourrait relever d’une certaine forme de normalité : un homme conduit sa voiture, un nouveau né babille dans son lit d’enfant, on frappe à la porte…

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