Radio on

In Art, Clips, Non classé
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Comment maintenir l’entertainment alors que l’emploi du temps imposerait, pour publier plus souvent ici, de repousser à l’âge de la retraite toute activité consistant à, par exemple, se nourrir, ou dormir ? En passant le relais à ceux qui alimentent régulièrement le stock des choses que je mets de côté, pas pour les accumuler rien que pour moi, mais au contraire pour être certain que, le jour venu, elles seront encore là, disponibles, pour être partagées. Parce que, certes, on parle de bagnoles ici, ce qui pourrait supposer qu’on passe notre temps à enfoncer nos doigts noircis aux résidus de graisse mécanique dans le plastique moussé des tableaux de bord, mais en fait, ce qu’on vise, c’est tout de même une forme de beauté, et la beauté, ça se reconnaît précisément au fait qu’on a immédiatement envie de la partager, en croisant les doigts pour que, ce qu’on propose, ce soit susceptible de dépasser la barrière des goûts individuels, de toucher d’autres sensibilité, et de former une expérience commune. Et l’automobile a ceci de commun avec la musique ou le cinéma : elle est une expérience partageable. 

D’où la nécessité de placer des autoradios dans les voitures. 

D’où la nécessité de placer des voitures dans les films. 

D’où l’invitation, aujourd’hui, à aller faire un tour en bagnole dans L.A., en mode « radio on », au moment où la bande FM diffuse Tiny Dancer, mille fois entendu dans nos vies déjà presque cinquantenaires, chantonné intérieurement, ou braillé à tue-tête au moment où le refrain, sans cesse reporté au long du morceau, arrive enfin. 

Comme souvent avec Elton John, c’est une merveille d’association entre les paroles de Bernie Taupin et sa propre mise en musique, avec cette manière chaloupée de faire avancer le propos, comme si le texte était une mer dont les vagues venaient, avec la marée, envahir paisiblement la plage, l’air de rien. La marée montante, c’est une somme de petites invasions qui se retiennent. Puis vient la submersion finale, et ce refrain qui est une libération, et un accomplissement.

L’année dernière, est venue à l’entourage d’Elton John l’idée d’offrir à ce titre, pour la première fois, un clip. Un concours fut lancé, et des réalisateurs proposèrent leur script. C’est Marc Weiland qui l’emporta avec un projet tout simple : un clip choral, urbain, et sacrément ensoleillé, dans cette ville qui n’en est presque pas une tant elle a la dimension d’un monde à part entière : Los Angeles, territoire entièrement dévolu à l’automobile, par nécessité bien plus que par passion. Et parce qu’on y roule sans cesse, et parce qu’on y écoute de la musique, le film accompagne des segments de vies, dans leur extraordinaire banalité : des rencontres, des séparations, des désillusions, des changements de cap, rien d’incroyable. Ceci est tissé avec le fil de nos vies. Et si c’est une forme de témoignage de ce que c’est que vivre, quand on appartient au genre humain, alors ce genre de clip ressemble, fort, au générique de ces vies, dont nous sommes tous plus ou moins semi-conducteurs. Et c’est sans doute là le propre, et la grandeur, de la pop culture : 


Et en bonus, le making-of, avec Elton John himself, dans ses abominables vestes de survet’ (preuve qu’entre Elton John et Polnaref, il n’y a qu’un pas, mais que ce pas, justement, et heureusement, fait tout) : 

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